La culture, source inépuisable de résilience

Chers amis,
Être suppléant peut être parfois ingrat, aussi ai-je eu envie de laisser, ce mois-ci, la plume et la lumière à mon fidèle suppléant David Manto que je remercie de m’accompagner depuis 4 ans dans la discrétion mais sans jamais manquer d’intelligence ni d’exigence.
Caroline Abadie, Députée
Dans un entretien au Monde paru en 2012, l’écrivain italien Umberto Eco affirmait que la culture était notre seule identité. Il voulait ainsi rappeler que, quelles que soient les épreuves auxquelles sont confrontés les peuples, elles peuvent toujours être surmontées par la création sous toutes ses formes.
Un regard sur l’Histoire de l’Europe et du monde lui donne raison.
Jusqu’en 1914, une longue période de mondialisation de l’économie et des échanges est rendue possible par la révolution industrielle. L’écrivain autrichien Stefan Zweig en fait une description remarquable dans son ouvrage intitulé «Le Monde d’hier». Les bateaux à vapeur permettent aux Européens en quête d’un avenir meilleur d’émigrer en Amérique et l’intensification du commerce maritime. Les voyages entre régions et pays sont facilités par le train, rapprochant les peuples économiquement et culturellement.
L’émergence d’une conscience européenne par les arts s’observe dans tous les champs culturels : opéra, théâtre, littérature, philosophie, peinture… Les nouvelles écoles et tendances comme par exemple l’impressionnisme et l’art nouveau naissent et se diffusent en tous points de l’Europe, de Paris à Vienne, de Londres à Berlin ou bien encore de Saint-Pétersbourg à Rome.
Mais il faut croire que les peuples et les artistes étaient davantage en avance sur leur temps que leurs responsables politiques et militaires.
Car la Grande Guerre vient tout interrompre pendant quatre longues années de cauchemar. Le Monde d’hier n’est plus.
La pulsion de vie repart avec plus de vigueur encore dans les années 1920 chez les vainqueurs comme chez les vaincus. Eros succède à Thanatos. Aux Etats-Unis, les roaring twenties donnent naissance au jazz et refondent la danse et la peinture. Paris devient la capitale de l’art déco tandis le Bauhaus renouvelle l’architecture et le design, la modernité, mais également la photographie, le costume et la danse dans l’Allemagne de Weimar.
Le cinéma s’impose en quelques années comme un art majeur. Muet puis parlant, il est composé comme la littérature de sous-catégories. Ainsi courts et longs métrages, comédies romantiques et dramatiques, fresques historiques, œuvres comiques et films d’anticipation sont produits de par l’Europe et le monde. Aux pionniers du septième art Lumière, Méliès et Griffith succèdent les Renoir, Fresnay, Chaplin, Ford, Murnau, Lang et tant d’autres. Des œuvres littéraires sont aussitôt adaptées au cinéma. « A l’Ouest rien de nouveau », roman de guerre d’Erich Maria Remarque est porté à l’écran, amplifiant la portée de son message pacifique.
Mais dans les années trente, ce sont les fanatismes et les dictateurs qui auront le dernier mot. Ces derniers s’efforceront de détourner et d’instrumentaliser la culture au service de leur projet politique.
Après 1945, les Européens de l’ouest découvrent la société de consommation. La culture est l’un des instruments de la Pax Americana. Un mouvement populaire, profond et durable s’enclenche.
A partir de 1957, la culture joue et jouera un rôle majeur dans la naissance et la consolidation de l’Union Européenne. Les jumelages entre villes et villages français et allemands sont encouragés pour rapprocher les peuples, créer les conditions d’un vécu commun heureux et pacifié et tourner la page des deux conflits mondiaux. A Vienne, un premier jumelage est ainsi conclu avec la ville d’Esslingen en Allemagne dès 1958.
Comme toutes les crises majeures qui l’ont précédée, la crise du Covid laissera ensuite la place à une période d’après-crise. Alors que des centaines de milliers de familles pleurent leurs morts à travers le monde, la culture incarnera une fois encore le chemin de l’espoir.
C’est pourquoi notre gouvernement relance le Pass Culture, créé en 2017, permettant aux jeunes à partir de 18 ans de recevoir 300 € pendant 24 mois pour découvrir et réserver les propositions culturelles de proximité et les offres numériques (livres, concerts, théâtres, musées, cours de musique, abonnements numériques… etc.) de leur choix. Et à partir de janvier 2022, seront offerts 25 € pour les 4èmes, 25 € pour les 3èmes et 50 € par année et par élève en 2nde, 1ere et terminale.
Le Pass Culture a trois objectifs :
  • Réduire les inégalités entre les élèves en offrant à chacun les moyens d’accéder à la culture.
  • Encourager la demande en biens et spectacles culturels pour relancer l’activité du monde de la culture durement impacté par la crise sanitaire.
  • Jeter les bases d’une renaissance culturelle française et européenne synonyme de diversité à l’échelle du monde, en contrepoint de la position toujours plus hégémonique des géants du numérique.
Ce choix pourra être critiqué par ceux qui ne conçoivent la culture que comme une vitrine bien visible, tel un trophée qu’on expose et par les élus qui, pour le compte de leur collectivité, décident d’investissements pharaoniques sans se soucier de création artistique, ni de son accessibilité. Car bien souvent, c’est la jeunesse qui n’a pas les moyens d’accéder à l’offre culturelle dont pourtant elle devrait être la première bénéficiaire.
Enfin, il faut investir dans la création artistique à grande échelle, dans le talent artistique qui est l’une des facettes les plus admirables du génie humain. Cette nouvelle dynamique rayonnera dans tous les territoires, irriguera la société dans son ensemble et tracera le chemin de la sortie de crise post-covid. J’en suis convaincu.
Pour terminer, je souhaite à plus brève échéance à tous les Viennois un heureux festival de Jazz. Car c’est bien grâce à cet événement culturel de premier plan, le cinquième festival en importance organisé en France, que la ville de Vienne est connue et reconnue depuis 1981 dans notre pays, en Europe et dans le monde comme une place forte de la musique et de la diversité culturelle pour le plus grand bonheur de tous.
David Manto, suppléant de Caroline Abadie
Liens utiles :
https://app.passculture.beta.gouv.fr/
https://www.jazzavienne.com/fr

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