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Chers amis,
L’Assemblée nationale examinera aujourd’hui la proposition de loi donnant et garantissant le droit à une fin de vie libre et choisie. Je regrette la démarche d’obstruction menée par un petit groupe de députés de droite et d’extrême-droite, qui en déposant plus de 3.000 amendements, confisquent un débat très attendu des Français et que nous devons aborder de façon transpartisane.
C’est effectivement un sujet qui touche à l’intime et à ce que nous avons de plus cher notre vie et celle de nos proches et qui a déjà été largement débattu, depuis des décennies, dans notre pays. Des affaires médiatisées, comme des drames personnels, ont permis à chacun de se faire une opinion, et de l’exprimer, dans un cadre familial et amical ou plus largement, comme à l’occasion des Etats généraux de la bioéthique qui, en 2018, lui ont consacré une large part de leurs travaux.
Or le constat est largement partagé : il arrive encore de « mal mourir » en France, malgré les progrès de la médecine, le développement des soins palliatifs et l’extraordinaire travail des soignants. La tristesse du départ peut encore, trop souvent, être précédée d’une longue période de douleur physique et psychologique, quand toute envie et tout espoir ont disparu. Un accompagnement actif vers la fin de vie, qui respecte le droit de chacun à disposer de son propre corps, semble alors le seul moyen de soulager cette souffrance et, par-dessus tout, de respecter notre dignité. Aujourd’hui, cela ne peut se faire que par des moyens détournés, dans l’illégalité en France, ou, pour ceux qui le peuvent, là où cela est autorisé à l’étranger.
Désormais, notre société est prête à cette évolution qui fait largement consensus : 9 Français sur 10 se disent favorables à l’accompagnement vers la fin de vie. C’est également le cas ailleurs en Europe, cinq autres pays s’étant engagés dans cette voie, sans qu’on y ait constaté d’abus ou de dérives.
La proposition de loi examinée ce jour prévoit que cette liberté repose sur un consentement personnel, libre et éclairé qui sera garanti par tous les garde-fou que nous avons prévus. Réservée
aux situations d’impasse thérapeutique et de souffrance qui ne peut être apaisée, la décision de la
personne qui souhaite bénéficier d’une aide à la fin de vie serait prise dans un échange permanent
avec les médecins comme les personnes de confiance. La démarche pourrait bien sûr être interrompue à tout moment. Et une clause de conscience pourrait exonérer d’une quelconque obligation tout praticien qui ne souhaiterait pas, en raison de ses convictions philosophiques ou religieuses, pratiquer cet acte.
Certains ont voulu caricaturer ce texte, en faisant le lien avec la pandémie que notre pays affronte.
Il n’y a évidemment aucun rapport. Il s’agit d’apporter une réponse à quelques centaines de personnes, en grande souffrance et auxquelles le cadre existant, comme les soins palliatifs ou la sédation profonde prévue par la loi Claeys-Leonetti, n’apporte aucun soulagement. Au contraire, pour lutter contre le Covid-19, des moyens médicaux, humains et financiers exceptionnels qui ont été mobilisés depuis plus d’un an pour prendre en charge les victimes, et notre stratégie vaccinale donne la priorité aux personnes fragiles en raison de leur âge ou de leurs pathologies. Cela témoigne de la volonté de notre société de protéger ceux qui doivent l’être, sans autre considération que leur santé et leur bien-être.
Je ne m’attends pas au soutien unanime de mes concitoyens mais il m’a semblé important, sur un sujet si sensible, d’expliquer mon vote. C’est donc en conscience et en responsabilité que j’apporterai ma voix à cette proposition de loi, qui, en consacrant cette ultime liberté, représente un réel progrès sociétal pour notre pays.
Votre députée,
Caroline Abadie