800 000 majeurs doivent aujourd’hui, en France, demander l’autorisation à un juge pour se marier, se pacser ou divorcer. Ce sont 800 000 majeurs protégés, qui du fait d’un handicap mental ou physique, ont été soumis à un régime de protection judiciaire. En clair : les tutelles et curatelles. Ces droits fondamentaux, très liés à l’intime, leur sont retirés à leur entrée sous la mesure de protection.

Pourtant, la protection juridique des personnes a pour objet de protéger des personnes, handicapées ou en perte d’autonomie, et leur patrimoine. Dès lors, on peut s’interroger sur les raisons qui ont permis depuis tant de décennies, de leur retirer leur liberté, dans leur choix sentimental, et de le soumettre à l’approbation d’un juge.

Dans le cadre de l’examen du projet de loi de programmation et de réforme de la justice, l’Assemblée nationale a voté, en première lecture, l’élargissement de l’exercice des droits fondamentaux des personnes faisant l’objet de mesures de protection judiciaire.

Depuis plusieurs décennies, les associations militaient pour que certains droits personnels, ne soient plus niés. La France, à l’instar de nombreux pays, va enfin reconnaître aux majeurs protégés le droit de se marier, de se pacser ou de divorcer. En contrepartie, car il ne s’agissait pas de laisser ces adultes vulnérables sans protection, le tuteur pourra saisir le juge pour s’y opposer estimant que le majeur, par cet acte de s’unir ou se désunir, se met en danger. Par ailleurs, pour répondre aux légitimes interrogations quant au régime matrimonial, le tuteur pourra choisir le régime le plus favorable à la personne dont il a la charge.

Toujours dans la même idée, et concrétisant une promesse du président de la République, les députés de LaREM, introduisent un droit de vote pour les adultes sous tutelles (environ la moitié des 800 000 majeurs protégés) qui jusqu’ici se voyaient retirer ce droit dans une grande majorité des cas. Madame Abadie, députée de l’Isère, d’ailleurs en charge d’une mission sur les droits fondamentaux des majeurs protégés, a défendu ces avancées, il y a deux semaines en commission des Lois et ce jeudi dans l’hémicycle, qu’elle qualifie d’avancée cruciale des droits fondamentaux : « Cette mort civique amenait très souvent des parents à ne pas mettre sous tutelle leur enfant, devenu adulte, nécessitant pourtant cette protection. Les personnes protégées ne doivent plus être exclues de la citoyenneté, au motif qu’elles n’ont pas le discernement suffisant. Or en France, et c’est heureux, le droit de vote n’est pas capacitaire. Il n’est requis aucune faculté de discernement particulière pour être inscrit sur les listes électorales. »

Plus de citoyenneté, plus de droits : le vote de ce jeudi marque la fin de ces discriminations, et démontre que le regard de la société a changé très positivement sur « ces personnes extraordinaires ».